posted by Maître Touhami17/06/2025
Vous avez du mal à distinguer l'usufruit du droit de Zina ? Vous n'êtes pas le seul. Ces deux notions sont des droits réels principaux en droit marocain, mais elles recouvrent des réalités bien distinctes.
Comprendre la différence entre l'usufruit et le droit de Zina est essentiel pour saisir la portée des droits et obligations de chacun. Cet article décortique pour vous la définition, les droits, les obligations et les modes d'extinction de chacun de ces droits, tous deux régis par la loi n° 39-08 relative au code des droits réels.
L'usufruit est un concept clé en droit immobilier.
Il s'agit d'un droit réel qui permet à une personne, l'usufruitier, de jouir et d'exploiter un bien immobilier appartenant à autrui
L'usufruit, ou حق الانتفاع (haq al intifae) en arabe, est défini par l'article 79 de la loi n° 39-08 comme un « droit réel de jouissance et d’exploitation d’un immeuble sur la propriété d’autrui et qui s’éteint nécessairement à la mort de l’usufruitier ».
Il est encadré par les articles 79 à 104 de cette même loi.
Ce droit peut être établi par la volonté des parties (un contrat) ou par la loi, et peut être assorti d'un terme ou d'une condition.
L'usufruitier dispose de droits étendus.
Il peut exploiter le bien et percevoir tous ses fruits, qu'ils soient naturels, industriels ou civils.
Cela inclut les bois coupés périodiquement, les carrières en exploitation, et les cultures non récoltées au moment de l'établissement de l'usufruit.
Il jouit également de tous les droits attachés à l'immeuble, comme les servitudes.
De plus, l'usufruitier a la faculté de céder, d'hypothéquer ou de donner à bail son propre droit d'usufruit.
Cependant, il ne peut réclamer aucune indemnité pour les améliorations qu'il aurait apportées au bien, même si sa valeur a augmenté.
En contrepartie de ses droits, l'usufruitier doit respecter plusieurs obligations.
Il doit préserver le bien 'en bon père de famille' , s'acquitter des charges périodiques comme les impôts , et réparer les dommages causés par sa faute.
Une obligation cruciale est d'informer le nu-propriétaire de toute usurpation par un tiers ou de toute perte du bien.
S'il omet de le faire à temps, il devient responsable des dommages qui en résultent pour le propriétaire.
Enfin, à l'extinction de son droit, il doit restituer le bien.
Pour une personne physique, l'usufruit s'éteint par le décès, l'expiration du terme fixé, la perte totale du bien, la renonciation explicite, ou la réunion des qualités d'usufruitier et de nu-propriétaire.
Pour une personne morale, la durée maximale est de 40 ans.
L'usufruit peut aussi cesser par un abus de jouissance, comme des dégradations ou un grave défaut d'entretien.
Dans un tel cas, un tribunal peut prononcer l'extinction absolue de l'usufruit ou ordonner que le propriétaire reprenne la jouissance du bien, à charge pour lui de verser une somme annuelle à l'usufruitier jusqu'à la date d'extinction initialement prévue.
Le droit de Zina, ou حق الزينة (haq al Zina), est un droit réel qui confère à son titulaire la propriété des bâtiments ou constructions qu'il a érigés à ses frais sur le terrain d'une autre personne.
C'est un droit distinct de celui du propriétaire du sol
Ce droit est régi par les articles 131 à 137 de la loi n° 39-08.
Il doit être établi par un acte qui mentionne obligatoirement la nature, les caractéristiques et les dimensions du bâtiment.
Il est important de noter que le droit de Zina peut être établi sur des droits indivis, à condition d'obtenir l'accord de tous les copropriétaires.
Le titulaire du droit de Zina est propriétaire des constructions.
À ce titre, il peut les vendre ou les hypothéquer.
Il peut également établir des servitudes.
Une limite importante existe : le titulaire ne peut pas reconstruire ce qui a été détruit par vétusté ou force majeure sans obtenir au préalable l'autorisation du propriétaire du terrain (le nu-propriétaire).
La durée maximale du droit de Zina est impérativement fixée à 40 ans.
Même si l'acte constitutif prévoit une durée plus longue ou n'en mentionne pas, la durée est légalement ramenée à 40 ans.
Le droit s'éteint à l'expiration de cette durée, par renonciation explicite, par confusion (lorsque le titulaire du droit de Zina devient aussi propriétaire du terrain), ou par la perte totale du bâtiment.
Bien que tous deux soient des droits réels principaux, leurs natures, durées et les droits qu'ils confèrent sont foncièrement différents.
C'est la différence majeure.
L'usufruit est un droit de jouissance et d'exploitation sur un bien existant appartenant à autrui.
Le droit de Zina, quant à lui, est un droit de propriété sur les bâtiments que son titulaire a construits sur le terrain d'autrui.
En résumé, l'usufruit confère un droit de jouissance, tandis que le droit de Zina confère un droit de propriété.
Dans un usufruit, le nu-propriétaire possède le terrain et le bâtiment ; dans un droit de Zina, le nu-propriétaire possède le terrain, mais le bénéficiaire du droit de Zina possède le bâtiment.
La durée de l'usufruit pour une personne physique est viagère (liée à la vie de l'usufruitier), tandis que la durée maximale du droit de Zina est de 40 ans.
De plus, le droit de Zina est transmissible par héritage ou testament, ce qui n'est pas le cas de l'usufruit, qui s'éteint de manière intransmissible au décès de l'usufruitier.
Enfin, une distinction juridique importante est qu'un droit d'usufruit peut être établi sur un droit de Zina.
L'inverse, cependant, n'est pas possible.
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